Durant deux jours fin janvier, nous avons vécu sous le regard d’illustres pionniers des techniques appliquées à l’aviation ou à l’automobile au Musée des Arts et Métiers : Blériot, Bréguet ou encore Arzens. Ils incarnent des aventures humaines qui les dépassent. Ces figures emblématiques ne doivent pas faire oublier qu’ils amènent avec eux les résultats des précédents échecs et des communautés qui sont venus les inspirer et les épauler. L’histoire les a choisis pour représenter l’aventure humaine et le musée en devient alors une vitrine qui en garde la mémoire.
Ces deux jours nous ont montrés que le musée sait aussi devenir un média à travers lequel échangent des ingénieurs, designers et citoyens autour des nouvelles versions d’objets roulants pour en construire des futurs. Bien sûr les emblèmes de l’histoire des arts et des métiers se reflètent dans les prototypes de l’extrême défi, ils les incluent et les transcendent. Le musée est à l’origine un conservatoire destiné à former des ingénieurs à l’aide de démonstrations réalisées à partir d’objets scientifiques. Il devient ici un lieu de débats, d’expérimentations, de jeux, de formation pour interroger les techniques, amener les concepteurs à faire les meilleurs choix et inviter le public à d’autres possibles.
L’extrême défi, par son approche systémique ou intégrale, embrasse simultanément tous les acteurs (industrie, startup, laboratoire, collectivité, école, association, agence et ministère), les différentes temporalités (idéation, prototypage et expérimentation, industrialisation) et
tous les niveaux de complexité (de la recherche sur les tissus pouvant réaliser la fonction d’étanchéité, aux expérimentation de véhicules dans des territoires ruraux, en passant par la conception d’usines distribuées pour assembler les véhicules au plus près des utilisateurs, etc). Ce programme se veut inclusif en invitant toutes les parties prenantes intéressées à rejoindre et collaboratif en travaillant ensemble les principaux verrous et composants.
A l’image de ces deux jours au Musée, ce programme se développe comme un média permettant d’alimenter également des réflexions sur l’évolution de la Carte des Formations dans les lycées professionnels et les écoles d’enseignements supérieures (Rapport d'étape sur ce sujet). Des futures réalisations d'élèves seraient, par elles-mêmes, de parfaits moyens pour communiquer puisqu’elles présenteront à la fois l’aspect technique, mais aussi pédagogique, à la fois individuel et collectif. Et ces futurs métiers rendront possibles de nouvelles industries.
Quand des enfants découvrent au Musée ces véhicules, les essayent, ils projettent de nouvelles options de mobilités quotidiennes pour eux et leurs parents. Ils pourront ensuite les recroiser dans leur école pour apprendre l’énergie ou la géométrie puis à la fête du quartier pour transporter du matériel, ou encore dans leur rue comme véhicule municipal. A leur échelle, ces prototypes deviennent également des médias pour échanger entre utilisateurs, concepteurs et aménageurs pour re-concevoir simultanément les véhicules, aménagements, temporalités quotidiennes, programmes pédagogiques, métiers et industries.
Annoncée et tant recherchée, la réindustrialisation passe assurément par les musées pour mieux se nourrir des forces créatrices de nos précédents succès mais aussi comme des lieux de médiation, de dialogue et de construction de réalités tangibles, crédibles et souhaitables.